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Industrie textile et RSE : décryptage des réglementations britanniques

Maïlys REBORA
Head of Business Intelligence
Publié le
December 10, 2024
House of Commons United Kingdom

Introduction

Le Royaume-Uni s'est imposé comme un pionnier en matière de responsabilité sociale des entreprises (RSE) et de législation sur le développement durable. En étant l’un des premiers pays à s’engager légalement pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, le Royaume-Uni a ouvert la voie et donné l’exemple à d’autres nations.

Dans cet article, nous allons nous pencher sur les principales réglementations britanniques en matière de RSE qui ont un impact sur l'industrie de la mode. Qu'il s'agisse de protéger les consommateurs contre les substances dangereuses et le greenwashing, d'introduire des lois plus strictes en matière de devoir de vigilance et de transparence de la chaîne d'approvisionnement ou de s'attaquer au problème des déchets d'emballage, ces mesures établissent de nouveaux standards en matière de soutenabilité.

Pour les marques, comprendre ces réglementations et s'y conformer n'est pas seulement une obligation légale : c'est aussi l’opportunité d'instaurer une relation de confiance avec les consommateurs et de leur offrir plus de transparence tout en contribuant à un avenir plus durable.

Examinons les détails de ces lois et leurs implications pour l'industrie de la mode.

Les réglementations relatives à la protection des consommateurs et au Greenwashing dans l'industrie de la mode au Royaume-Uni

Le Royaume-Uni a mis en place des réglementations strictes pour protéger les consommateurs des substances nocives et des pratiques commerciales trompeuses. Qu'il s'agisse des General Product Safety Regulations (GSPR), qui garantissent que seuls des produits sûrs arrivent sur le marché, des exigences de sécurité chimique du REACH ou des règles plus strictes en matière d'allégations environnementales, ces lois imposent aux marques de mode de bien connaître leurs produits et de fonder toute allégation sur des preuves solides.

Règlement sur la sécurité générale des produits (GPSR) : Garantir des produits sûrs aux consommateurs britanniques

Les GPSR  jouent un rôle essentiel depuis 2005 dans la protection des consommateurs britanniques en garantissant que tous les produits mis sur le marché peuvent être utilisés et portés en toute sécurité.

Les producteurs, y compris les importateurs, ont des obligations spécifiques pour garantir la sécurité des produits. Ils doivent veiller à ce que les produits puissent être utilisés en toute sécurité dans des conditions normales ou prévisibles et fournir aux consommateurs les informations essentielles pour évaluer les risques potentiels et prendre les précautions nécessaires. Pour assurer la traçabilité, les producteurs doivent indiquer leur nom et leur adresse, ainsi que les références du produit ou toute informations concernant le lot ou l’emballage du produit. En outre, ils sont tenus de surveiller les risques par le biais de tests et d'enquêtes sur les plaintes concernant les produits et de maintenir les distributeurs informés.

Si un produit s'avère non conforme, le producteur doit notifier des risques et des mesures de correction qui auront été prises pour y remédier à l'autorité de contrôle compétente.

Pour l'industrie textile, la conformité à la GPSR exige une évaluation approfondie des risques potentiels, tels que les produits chimiques nocifs utilisés dans la production de tissus ou les dangers comme l'inflammabilité. Ces réglementations exigent que les fabricants, les importateurs et les distributeurs mettent en œuvre des tests rigoureux et des processus de contrôle de la qualité afin de répondre à des normes de sécurité précises.

Le non-respect de ces règles peut entraîner des rappels de produits, de lourdes amendes (jusqu'à 20 000£) ou des peines de prison, ainsi qu'une atteinte à la réputation d'une marque.

En adhérant au GPSR, les entreprises textiles peuvent protéger les consommateurs et démontrer leur engagement en faveur de la sécurité de ces derniers.

REACH : Du règlement européen au règlement REACH du Royaume-Uni post-Brexit

Avec le Brexit, le Royaume-Uni a adopté sa propre version du règlement REACH (enregistrement, évaluation, autorisation et restriction des produits chimiques) de l'UE, désormais connu sous le nom de UK REACH.

Cette législation régit l'utilisation des substances chimiques dans les produits mis sur le marché britannique, y compris les textiles. Le UK REACH exige des fabricants et des importateurs qu'ils réalisent un suivi des substances chimiques utilisées dans leurs produits, qu'ils en évaluent les risques et qu'ils s'assurent qu'elles ne constituent pas une menace pour la santé humaine ou l'environnement.

Les entreprises doivent se conformer au règlement REACH pour faire preuve de diligence et garantir la sécurité des consommateurs.

Limiter le Greenwashing: le Green Claims Code et les règlementations sur la protection des consommateurs

Pour protéger les consommateurs contre les allégations environnementales trompeuses, le Royaume-Uni applique la réglementation relative à la protection des consommateurs contre les pratiques commerciales déloyales, qui interdit aux entreprises de faire des déclarations trompeuses sur leurs produits ou services.

En complément de ce cadre, le Green Claims Code, introduit par la Competition and Markets Authority (CMA) en septembre 2021, fournit des recommandations sur la manière de faire des déclarations environnementales précises, claires et fondées sur des preuves.

Le code s'articule autour de six principes fondamentaux :

  • Véracité et exactitude : les déclarations doivent refléter la réalité de l'impact environnemental d'un produit et éviter les exagérations ou les mensonges,
  • Clarté et sans ambiguïté : le langage utilisé doit être simple, afin que les consommateurs comprennent l'allégation sans confusion ni besoin d'éclaircissements supplémentaires,
  • Informations complètes : les détails importants concernant l'impact environnemental du produit ne doivent pas être omis ou dissimulés,
  • Comparaisons équitables et significatives : si les déclarations impliquent des comparaisons (par exemple, avec d'autres produits ou services), celles-ci doivent être significatives, fondées sur des données exactes et clairement expliquées,
  • Prise en compte de l'ensemble du cycle de vie : les déclarations environnementales doivent tenir compte du cycle de vie complet du produit, en évitant une approche étroite qui donne une image erronée de l'impact global
  • Substantivé : chaque déclaration doit être appuyée par des preuves crédibles et d’actualité qui peuvent faire face à un examen minutieux de la part des autorités de réglementation ou des consommateurs.

Les entreprises sont encouragées à suivre une liste de contrôle détaillée basée sur ces principes fondamentaux.

Le non-respect de ces normes peut entraîner des mesures d'exécution en vertu de la loi sur la protection des consommateurs, ce qui souligne l'importance de recueillir des informations tout au long de la chaîne de production pour justifier toute allégation.

Pour plus de détails, consultez le Green Claims Code et la checklist de la CMA sur la page web officielle du gouvernement britannique.

Transparence de la chaîne d'approvisionnement et diligence raisonnable au Royaume-Uni : principales réglementations pour des pratiques commerciales éthiques

Le cadre législatif britannique comprend des mesures et des projets de réglementation destinés à améliorer la transparence de la chaîne d'approvisionnement et à promouvoir des pratiques éthiques dans tous les secteurs.

Pour le secteur textile, ces lois comprennent le Modern Slavery Act (loi sur l'esclavage moderne), le projet de loi sur les droits de l'homme et l'environnement (Commercial Organisations and Public Authorities Duty - Human Rights and Environment - Bill), les exigences de divulgation liées au climat et un projet de normes d'établissement de rapports sur le développement durable.

Cette section examine comment ces réglementations incitent les entreprises à assumer la responsabilité de leurs chaînes d’approvisionnement, à intégrer les droits de l’homme et les risques environnementaux dans leurs pratiques, et à publier des rapports transparents sur leurs initiatives en matière de développement durable.

Loi sur l'esclavage moderne : Renforcer la responsabilité de la chaîne d'approvisionnement

La Modern Slavery Act s'applique depuis 2015 à toute organisation commerciale opérant au Royaume-Uni, fournissant des biens ou des services et générant un chiffre d'affaires annuel de 36 millions de livres sterling ou plus.

En vertu de cette loi, les entreprises sont tenues de publier une déclaration sur l'esclavage moderne annuelle qui décrit les mesures qu'elles ont prises pour identifier et traiter les risques de travail forcé, de trafic d’êtres humains et d'autres formes d'esclavage moderne dans le cadre de leurs activités et de leurs chaînes d'approvisionnement.

Outre la déclaration, les entreprises doivent mettre en œuvre de solides mécanismes de diligence raisonnable pour évaluer, atténuer et contrôler les risques liés à l'esclavage moderne. Ces mécanismes comprennent souvent des audits de la chaîne d'approvisionnement, des évaluations des risques et des programmes de formation des fournisseurs.

La non-conformité peut entraîner des dommages importants pour la réputation de l’entreprise, une mise sous surveillance réglementaire et une perte de confiance de la part des consommateurs.

Nouvelle loi britannique sur le devoir de vigilance : Projet de loi sur le devoir de vigilance des organisations commerciales et des autorités publiques (droits de l'homme et de l’environnement)

Le projet de loi Commercial Organisations and Public Authorities Duty (Human Rights and Environment) Bill, qui devrait entrer en vigueur à la mi-2026 pour l'exercice fiscal 2025, introduit des obligations complètes de diligence raisonnable et de transparence pour les entreprises et les autorités publiques. Le champ d'application exact sera défini par des règlements ultérieurs du secrétaire d'État.

Ce projet de loi exigera des organisations qu'elles intègrent une diligence raisonnable rigoureuse en matière de droits de l'homme et d'environnement dans l'ensemble de leurs activités, filiales et chaînes de valeur. Il rend obligatoire la publication de la chaîne de valeur afin de garantir une traçabilité complète et introduit une responsabilité civile, des sanctions et des infractions pénales en cas de non-respect de ces obligations.

Les principales exigences en matière de diligence raisonnable sont les suivantes

  1. Intégrer ces pratiques dans les politiques et les systèmes de gestion,
  2. L'identification et la prise en compte des préjudices potentiels,
  3. Maintenir des mécanismes de réclamation,
  4. Contrôler activement l'efficacité des mesures prises et en rendre compte.

Les obligations en matière de rapports prévues par ce projet de loi sont très étendues. Les organisations éligibles doivent publier et soumettre chaque année des rapports sur un site web du registre dans les six mois suivant la fin de l'exercice financier. Ces rapports doivent détailler les plans de diligence raisonnable pour l'année à venir, évaluer l'efficacité de l'année précédente et inclure :

  • des informations sur la diligence raisonnable en matière de droits de l'homme et d'environnement, les résultats et les mesures,
  • une description de la chaîne de valeur permettant une traçabilité complète,
  • un rapport sur les émissions de gaz à effet de serre (portée 1, 2 et 3).

Pour répondre à ces attentes, les entreprises sont encouragées à s'aligner sur les Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme.

Le non-respect de ces principes peut entraîner des sanctions sévères, notamment des amendes pouvant aller jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires mondial de l'organisation.

Normes de reporting sur le développement durable : Renforcer la transparence pour les investisseurs

Le Royaume-Uni fait progresser l'établissement de rapports sur le développement durable grâce aux réglementations existantes et aux normes futures.

Actuellement, les rapports environnementaux sont obligatoires pour les entreprises en vertu de deux amendements clés : les Companies (Strategic Report) (Climate-related Financial Disclosure) Regulations 2022 et les Limited Liability Partnerships (Climate-related Financial Disclosure) Regulations 2022. Ces réglementations imposent aux grandes entreprises (plus de 500 employés) d'inclure des informations RSE dans leurs rapports annuels dans quatre domaines clés : la gouvernance, la stratégie, la gestion des risques et les mesures et objectifs.

À l'avenir, le Royaume-Uni prévoit d'établir des Sustainability Reporting Standards alignés sur les normes internationales d'information financière (IFRS). Ces normes à venir visent à doter la Financial Conduct Authority (FCA) des outils nécessaires à l'application d'exigences claires et précises en matière de rapports sur le développement durable pour les entreprises cotées en bourse au Royaume-Uni, afin de fournir aux investisseurs des données fiables et comparables (car normalisées) sur les efforts déployés par les entreprises en matière de développement durable.

La réglementation britannique s'attaque aux déchets d'emballage et à la pollution plastique dans l'industrie de la mode

Le Royaume-Uni prend des mesures décisives pour lutter contre les déchets d'emballage et la pollution plastique, en adoptant des réglementations visant à atteindre ses objectifs Zéro émission nette. L'industrie de la mode est soumise à une pression croissante pour adopter des pratiques d'emballage durables, grâce à des mesures telles que la Taxe sur les emballages plastiques et la Responsabilité élargie du producteur pour les emballages.

Cette section explore la manière dont ces réglementations incitent les marques à se conformer aux normes de durabilité tout en réduisant l'impact de leurs emballages sur l'environnement.

Taxe sur les emballages en plastique : Encourager les pratiques d'emballage durables

La Plastic Packaging Tax, entrée en vigueur le 1er avril 2022, cible les organisations commerciales du Royaume-Uni qui ont importé ou fabriqué au moins 10 tonnes de composants d'emballages en plastique au cours des 12 derniers mois, ou qui prévoient de le faire dans les 30 prochains jours.

La taxe s'applique aux emballages plastiques finis qui contiennent moins de 30 % de plastique recyclé, les taux atteignant 217 85£ par tonne en 2024. Les emballages en plastique contenant 30 % ou plus de plastique recyclé sont exemptés de la taxe, mais ils sont pris en compte dans le calcul du seuil de déclaration de 10 tonnes.

Les marques de mode doivent s'assurer qu'elles s'inscrivent à la taxe si elles atteignent le seuil, tiennent des registres détaillés de leurs emballages et cherchent activement à réduire leur dépendance aux plastiques pour éviter d'être soumises à la taxe.

Vous pouvez en savoir plus et trouver des conseils détaillés sur la page web du gouvernement britannique.

Responsabilité élargie du producteur en matière d'emballage : Exigences de conformité pour les marques de mode

Depuis 2023, le règlement Responsabilité élargie du producteur (REP) pour les emballages exige que les organisations commerciales dont le chiffre d'affaires annuel est égal ou supérieur à 1 million de livres sterling et qui importent ou fournissent plus de 25 tonnes d'emballages sur le marché britannique respectent des obligations strictes en matière d'emballages. Cela inclut les entreprises du secteur de la mode, qui doivent s'assurer qu'elles respectent les exigences en matière de collecte et de communication des données sur les emballages.

Dans le cadre de la REP, les marques de mode qui fournissent des produits emballés sur le marché britannique doivent collecter des données détaillées sur chaque référence d'emballage qu'elles utilisent.

Ces informations comprennent :

  1. Les données sur l’utilisation de l'emballage : type d'activité réalisée avec l'emballage - qu'il s'agisse de fournir des produits emballés sur le marché britannique sous leur propre marque, de placer des produits dans des emballages, d'importer des produits, de posséder une place de marché en ligne, de louer ou de prêter des emballages réutilisables ou de fournir des emballages vides,
  2. Le type d'emballage : par exemple, s'il s'agit d'un emballage ménager ou non ménager,
  3. La catégorie d'emballage : si l'emballage est primaire, secondaire, de transport ou tertiaire,
  4. Le type de matériau d'emballage et poids total mis sur le marché britannique.

Les organisations doivent communiquer les données sur les emballages deux fois par an, avec des échéances fixées pour les périodes de déclaration de janvier à juin et de juillet à décembre.

Les dates limites de soumission des données sur les emballages pour 2024 sont les suivantes :

  • Les données de janvier à juin doivent être communiquées entre le 9 août 2024 et le 1er octobre 2024,
  • Les données de juillet à décembre doivent être communiquées entre janvier 2025 et le 1er avril 2025.

En outre, les organisations seront soumises à des frais à partir de 2025 pour les emballages mis sur le marché en 2024, en fonction du type de matériau utilisé dans l'emballage, avec des frais moins élevés pour les matériaux facilement recyclables.

Les redevances ne s'appliqueront qu'aux grandes organisations, dont le chiffre d'affaires est d'au moins 2 millions de livres sterling. Les montants définitifs n'ont pas encore été déterminés, mais les redevances de base indicatives pour la première année sont désormais disponibles. Elles varient entre 110£ et 605£ par tonne, en fonction de la taille du matériau.

Pour plus d'informations sur les exigences en matière de données d'emballage, les entreprises de mode peuvent se référer aux orientations officielles du gouvernement britannique.

Alignement sur les tendances mondiales en matière de RSE : Les réglementations britanniques reflètent une évolution mondiale vers des pratiques plus durables

La vague de réglementations en matière de RSE qui déferle actuellement sur le Royaume-Uni s'inscrit dans un mouvement mondial plus large en faveur de la durabilité et des pratiques éthiques dans le secteur du textile. Les marques de mode doivent s'aligner sur les tendances internationales en s'assurant que leurs pratiques d'emballage, de respect des droits de l'homme et leurs politiques environnementales sont conformes aux nouvelles normes.

Cela implique la mise en œuvre de processus de traçabilité rigoureux pour permettre la collecte d'informations tout au long de la chaîne de production ainsi que la transparence requise par les différents cadres réglementaires.

Pour en savoir plus, consultez nos autres articles sur Maîtriser la stratégie de l'Union européenne pour des textiles durables et Toutes les réglementations RSE à connaître en France et à l’international pour les marques de mode  pour rester à jour sur les tendances mondiales en matière de conformité RSE.

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